Synthèse des interventions devant les parents de seconde, première et terminale – Mars 2025

Chers parents,
 
Les 18, 20 et 24 mars derniers, nous vous avions conviés à une réunion d’information sur les smartphones, l’accès aux écrans et l’intelligence artificielle (IA). Nous remercions vivement la centaine de parents qui ont pu répondre présents et ainsi alimenter les échanges lors de ces trois soirées très enrichissantes.
Il nous a semblé important de vous en présenter une synthèse pour que l’information de chacun soit complète. Et puisque plusieurs parents n’ont pu se rendre disponibles à aucune des trois réunions, nous en profitons pourrappeler brièvement l’état des lieux que nous avons dressé.
D’après nos informations, au moins 20 à 25 élèves de 2nde et de 1ère enfreignent actuellement la règle qui interdit la possession d’un smartphone jusqu’en Tale et, pour certains, nous le craignons, avec la complaisance de leurs parents.
Par ailleurs, depuis l’entrée en vigueur de cette règle, il s’est avéré que les usages numériques ont évolué dans un certain nombre de familles et que des « situations grises » se sont présentées, telles que des smartphones n’appartenant pas formellement aux élèves mais librement mis à leur disposition, la possession personnelle d’une tablette ou bien encore d’un lecteur MP3 avec connexion wifi…
Nous avons tenu à rappeler les raisons qui nous avaient poussés à mettre en place l’interdiction de possession d’un smartphone et la nécessité d’une limitation très forte de l’accès aux écrans. Elles peuvent se résumer à une simple application des principes de prudence et de cohérence. Nous avons rappelé que les écrans en général sont, à l’évidence, la porte d’entrée à des contenus inappropriés (pornographie, violence…), aux réseaux sociaux et leur promotion du culte de soi, aux risques du cyberharcèlement, à une exposition des enfants à de vrais prédateurs sur
internet, à une addiction aux écrans entraînant des effets sur la santé mentale (perte de capacités d’attention, agressivité, isolement, troubles du sommeil…), à des pertes de temps majeures (scrolling…). Tous ces dangers sont bien évidemment catalysés par la possession d’un smartphone.
De son côté, Monsieur le chanoine Despaigne a insisté sur le fait que le sujet était grave et qu’il était un devoir de le prendre très au sérieux. En effet, même s’il reste un outil utile et efficace, le smartphone peut aussi être une occasion de péché, notamment mortel. Or, le chanoine nous a rappelé que le premier devoir des parents était de veiller au Salut de leurs enfants. Les péchés auxquels ils s’exposent sont les suivants : désobéissance (aux règles que vous leur imposez), mensonge (s’ils utilisent ces appareils à votre insu ou sont très habiles pour contourner les contrôles
parentaux), paresse (temps perdu, fuite du devoir d’état), manque de charité, médisance, égoïsme, vanité (réseaux sociaux) et, bien sûr, impureté. La pornographie n’est pas un péché anodin mais un fléau qui abîme singulièrement l’âme et un boulet pour la vie spirituelle. Dans ce domaine, une prévention est absolument nécessaire à mettre en  place.
L’interdiction des smartphones est donc surtout un moyen de travailler au salut de l’âme de vos enfants !
Un temps d’échange a permis de dégager un ensemble de bonnes pratiques et conseils, ainsi qu’un élargissement des points de vigilance. Deux idées directrices se sont dégagées :
 
1) La nécessité de reprendre le contrôle de tous les objets connectés de la maison, ce qui exige un
investissement constant et durable des parents. Plusieurs conseils ont été échangés :
  • utiliser des outils de contrôle parental (temps de connexion, filtres, navigateur web spécialisé, vérifications des contenus consultés a posteriori …) ; quelques outils performants ont été évoqués :
    • Qustodio, Boomerang, Family Link, CovenantEyes, Brave…
  • vérifier les objets qui se sont connectés à la box et penser à l’éteindre en cas d’absence, voire la nuit.
  • se méfier de la grande docilité de son enfant concernant cet interdit : elle cache peut-être la possession d’un smartphone à l’insu de ses parents.
  • ne laisser aucun ordinateur/tablette/smartphone en libre accès à son enfant et encore moins dans sa chambre.
Nos milieux catholiques ne sont pas épargnés par le fléau de la pornographie. Comme l’indiquent les statistiques recensées par l’association stopauporno.fr, 52% des enfants de 15 à 17 ans ont déjà consulté un site pornographique dont près de la moitié via un smartphone, 49% sont tombés au hasard de leur navigation sur des images à caractère pornographique, 47% estiment que la pornographie participe à leur apprentissage de la sexualité et 12% visionnent au moins une vidéo pornographique par semaine.
Et ces statistiques sont les mêmes, qu’il s’agisse d’adolescents catholiques pratiquants ou non !
 
2) Le nécessaire dialogue avec les enfants sur les effets des écrans/smartphones pour gagner progressivement leur adhésion et préparer au mieux leur appropriation progressive des bons usages. Plusieurs témoignages de bonnes pratiques ont été apportés :
  • valoriser le fait que son enfant fait partie de cette minorité d’adolescents héroïques qui résistent !
  • comparer par écrit, avec son enfant, les avantages et inconvénients de la possession d’un smartphone ; la colonne des « moins », complétée objectivement, devrait faciliter sa compréhension de l’interdit.
  • penser à susciter l’envie d’autre chose pour détourner « l’appel des écrans ».
  • sensibiliser son enfant aux enjeux des traces numériques que laisse toute activité sur le web et sur le fait qu’il nourrit ainsi « big data ».
  • prendre le temps de consulter des documentaires comme « Derrière nos écrans de fumée » et d’en rediscuter avec son enfant pour comprendre le plus possible les enjeux et les risques.
 
Le sujet « smartphone/écran » ayant occupé la quasi-totalité de chacune de ces 3 soirées, nous n’avons eu que quelques minutes à chaque fois pour vous alerter rapidement sur l’utilisation de l’IA. Nous constatons malheureusement qu’en très peu de temps, un nombre non négligeable de nos grands élèves se sont habitués à son
usage. Par souci de cohérence, nous vous recommandons la même prudence : gardez le contrôle et dialoguez avec votre enfant afin qu’il ne cède pas aux sirènes de la paresse intellectuelle ! De notre côté, nous avons démarré cette année un travail de réflexion sur cette problématique avec le même objectif que pour la question des écrans et des smartphones : vous conforter dans vos choix éducatifs et vous sensibiliser sur les enjeux.
Nous avons bien conscience que cette lutte est très difficile, surtout quand 96 % des 12-17 ans sont équipés d’un smartphone en France. Vous qui tenez fermement cet interdit, vous êtes des héros ! Certains peuvent se sentir dépassés ou incompétents dans ces domaines, notamment parce que les pratiques et usages évoluent très vite. C’est pourquoi nous devons faire bloc, rester soudés et pouvoir compter sur une entraide qui sera toujours précieuse pour vous éviter ou éviter à d’autres parents certains pièges ou certaines difficultés.
Si donc vous aussi souhaitez partager quelques astuces, bonnes pratiques ou conseils, nous vous serions reconnaissants de nous les transmettre pour les diffuser. Par exemple, vous trouverez ci-dessous un document qu’un père de famille a pris le temps de rédiger pour vous aider à paramétrer votre box afin de vous protéger des sites malveillants et pornographiques ; ce père de famille se tient à votre disposition en cas de question ou de difficulté. Qu’il en soit ici vivement remercié !
 
Nous concluons en insistant sur l’importance de jouer « pleinement le jeu ». Vous n’imaginez pas l’intensité du poison qui est instillé dans l’esprit des élèves et de leurs parents quand ils découvrent qu’une famille ne respecte pas l’engagement qu’elle a pris et s’est engluée dans une hypocrisie assumée, allant ainsi complètement à rebours de l’esprit de la charte de notre école. Puisque nous nous définissons comme une « famille de familles », nous nous devons une solidarité de tous les instants sur ces sujets à si forts enjeux.
 
Vous l’aurez compris, il en va du salut de vos enfants. Il est donc indispensable de vous saisir de ces sujets et de vous investir ! Nous vous recommandons ainsi vivement la lecture deux ouvrages traitant du sujet du numérique et des écrans : La fabrique du crétin digital de Michel Desmurget, et Ecrans, un désastre sanitaire de Servane Mouton.
 
Nous vous prions de croire, Madame, Monsieur, à l’assurance de notre entier dévouement.
 
François-Xavier Clément, directeur général du groupe scolaire,
Chanoine Jean Despaigne, aumônier général,
Rémi Chedanne, directeur du secondaire et du lycée de garçons,
Alexandrine d’Anselme, directrice du lycée de jeunes filles,
Salvatore Niffoi, directeur du collège de garçons,
Marie-Hélène Tommy-Martin, directrice du collège de jeunes filles.
 

A LIRE : Se proteger des sites malveillants et pornographiques – juin 2025 – Conseils d’un père de famille

 

Courrier adressé aux parents en septembre 2018

« On ne comprend absolument rien à la civilisation moderne, si l’on n’admet pas d’abord qu’elle est une conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure. »
Georges Bernanos.

Chers parents,

Nous voici rentrés ! La rentrée n’est-elle pas synonyme d’enthousiasme ? Ne doit-elle pas nous réjouir alors que le travail nous attend, car c’est celui de la connaissance de la vérité. N’est-ce pas réjouissant de savoir que nous allons offrir à notre intelligence sa nourriture, son objet propre : le vrai, c’est à dire ce qui la perfectionne, qui l’actualise, ce sans quoi elle reste comme morte ? Si l’on ajoute que cette recherche sera authentique au point d’être en harmonie avec le trésor de la foi ; si d’ailleurs on rappelle qu’elle s’accompagnera de bonnes et profondes amitiés, on n’a plus besoin d’aller outre : il devient manifeste que la rentrée s’accompagne d’enthousiasme.

Au fond cette école nous offre – c’est notre espérance, malgré nos limites – la liberté. Pas un ersatz de liberté, mais l’authentique liberté : cette capacité de se porter vers ce qui est bien ; la liberté des enfants de Dieu. « Là où est l’Esprit du Seigneur, là est la liberté. »

Dans ce cadre, la citation trouvée en tête de ces lignes vous surprend et dénote. Expliquons-nous. Y aurait-il une possible mise en péril de cette liberté chrétienne qui fonde notre enthousiasme ? La chose serait alors à prendre au sérieux.

C’est précisément ce que nous craignons avec le développement de la téléphonie et la transformation des téléphones en smartphones.

De plus en plus tôt, les enfants ont accès à toutes ces technologies. La Wifi est omniprésente, tout est désormais numérique… Nombreux sont ceux qui dès le collège ont accès au chat, aux réseaux sociaux et à internet via le wi-fi… [1]

Il faudrait une étude approfondie pour manifester les conséquences de tout cela. Bornons-nous à mentionner les pertes de temps ainsi occasionnées, la disparition du sens du beau et du réel (c’est une image de soi que l’on fait vivre), les rêveries malsaines et les impuretés graves… Tentations bien réelles et qui peuvent donner lieu à de vraies addictions.[2] Par ailleurs, on ne peut passer sous silence l’isolement auquel conduisent les téléphones et les réseaux sociaux. Les enfants deviennent égocentriques et leurs amitiés très superficielles. Ils tentent de rompre leur solitude dans une course malsaine à la notoriété (fictive), et finissent pas se dégoûter d’eux-mêmes, ce qui est la porte ouverte à des cas de dépression de plus en plus graves et fréquents. De nombreux experts et observateurs ont témoigné que l’accès à ces réseaux et technologies est le plus souvent nuisible aux enfants.

Dans ce contexte, ces paroles de Gustave Thibon, prononcées il y a cinquante ans ne sont-elles pas cruellement actuelles ? « À une époque où l’homme, délivré des servitudes de la matière, devient l’esclave de ses moyens mêmes de libération et où tout se fait sous le signe de la vitesse, il n’y a rien de plus urgent que de reconquérir un peu de vraie liberté, de ne pas se laisser emporter tout entier par le mouvement ; un mouvement où le réflexe prend le pas sur la réflexion, et où le signal remplace le signe. »

Nous savons combien cette question vous préoccupe. Si nous vous écrivons, c’est pour vous exprimer tout notre soutien. Pour vous assurer que vous êtes nombreux à travailler en ce sens et qu’il faut tenir bon pour le bien, la vraie liberté, de vos enfants. Ils vous en remercieront certainement un jour. Sinon, nous risquons de les livrer à « ce vide intérieur, dont le premier symptôme est l’ennui qui dévore beaucoup de nos contemporains, surtout les jeunes, [et qui] est peut-être la plus grande menace qui pèse sur l’homme moderne. »

Cela explique aussi les nouvelles directives dont vous avez probablement déjà pris connaissance (interdiction à l’école des téléphones ayant un accès internet jusqu’en fin de seconde) et qui, nous l’espérons, vous aideront à mettre plus facilement les enfants dans un environnement favorable au travail, à la réflexion et à la méditation. Ces mesures – prises tardivement ce dont nous vous prions de nous excuser – porteront des fruits dans la mesure où nous nous trouverons en phase sur cette question importante.

La jeunesse s’accompagne souvent de faiblesse ; c’était la pensée de don Bosco qui cherchait à créer un environnement « où le péché devienne presque matériellement impossible ».

Nous espérons que notre lettre confortera vos sentiments en cette matière. Nos fonctions à Saint-Dominique nous offrent un petit promontoire duquel on peut apercevoir certaines choses qu’il serait bien coupable de taire…

Soyez assurés, chers parents, de notre profond et entier dévouement.

Michel Valadier, directeur du groupe scolaire,

Chanoine Robert Vignaud, aumônier.

[1] La décision du ministre de l’Éducation Nationale d’interdire les téléphones portables dans l’enceinte des établissements à la rentrée de septembre montre bien que ce problème est clairement identifié. Sans parler des déclarations régulières de fondateurs ou de pionniers des réseaux sociaux, qui confessent être effrayés par ce qu’ils ont créé, quand ils n’avouent pas ingénument interdire l’usage des smartphones à leurs propres enfants…

[2] Nous admettons bien volontiers qu’il est parfois prudent de doter un enfant d’un téléphone, mais, de nouveau, il en existe sans internet et sans wifi.