Chers parents,
Ces lignes vous sont adressées à la suite de réflexions menées par l’ensemble des directeurs et des aumôniers du groupe scolaire Saint-Dominique concernant les conséquences de l’usage généralisé et massif de ce que l’on nomme les NTIC, les nouvelles technologies de l’information et de la communication.
Ces réflexions ont été mûries, réfléchies. Et débattues aussi. Nous estimons de notre devoir d’éducateurs chrétiens de les partager aujourd’hui avec vous et vous invitons à y apporter la plus sérieuse attention.
Etat des lieux
Depuis maintenant quelques années, les téléphones portables, smartphones, iPod, iPad, iTouch, MP4, tablettes et autres lecteurs de musique… ont fait leur apparition à l’école et sont utilisés de plus en plus tôt puisque certains d’entre vous tolèrent que des enfants de CM les utilisent…
Aujourd’hui, l’accès à internet est très aisé : dans la plupart des foyers, des boîtes(freebox, livebox, bbox, dartybox…)proposent l’ADSL (internet à haut débit) avec des connexions wifi (c’est-à-dire sans fil) ; ce même wifi est disponible gratuitement dans beaucoup de lieux publics : magasins, restaurants tels que le Quick situé à côté de l’école (par exemple). Et, cerise sur le gâteau, les réseaux sociaux (Facebook, Google +) se sont imposés comme moyens « dits » de communication et de convivialité ; si ceux-ci intéressent moins les personnes de plus de 40 ans, ils n’ont malheureusement aucun secret pour beaucoup d’adolescents…
Bref, il est largement révolu le temps où nous pouvions, en veillant sur les lectures de nos enfants, la musique qu’ils écoutaient et les films qu’ils regardaient, contrôler aisément leur environnement.
Depuis des années, lors des réunions de rentrée, nous nous sommes efforcés – à notre place – de prévenir les parents de cette nouvelle donne dans leur mission éducative et de souligner les dangers pour la jeunesse d’un usage non contrôlé d’internet. Cet outil est un peu comme la langue selon Esope : il peut être la meilleure ou la pire des choses !
Vous trouverez en annexe de cette lettre quelques conseils très concrets pour un bon usage d’internet chez vous.
Nous voudrions insister maintenant sur le téléphone portable. Posons-nous d’abord cette question : à partir de quand peut-on posséder un téléphone portable ? Nous ne parlons pas ici d’un jouet inoffensif, mais d’un appareil qui sert à communiquer, à écrire et à se connecter sur internet. Il y a longtemps que le téléphone sert à autre chose qu’à téléphoner et nous devons en tenir compte car il nous semble fini, le temps où l’on donnait un téléphone portable à son fils chef de patrouille pour qu’il lance sa chaîne d’appel et pour éviter de bloquer la ligne familiale.
Nous vous suggérons donc la réponse suivante : un téléphone doit retrouver son utilité première et en posséder un doit répondre à un besoin légitime. Force est de constater qu’au lycée, sauf exception liée par exemple à la sécurité dans les transports en commun, le téléphone portable ne sert à rien ! Ah, si, “il donne l’heure”… c’est la réponse que fit un jour un élève de Terminale alors qu’il se faisait confisquer son téléphone.
Nous sommes au regret de constater qu’aujourd’hui, chez les garçons, en 2nde, 11 élèves sur 34 ont un téléphone portable, dont un avec un abonnement à internet ; 20 sur 26 en 1ère, dont 3 avec internet et 25 sur 28 en Terminale, dont 6 avec internet. Ce phénomène s’amplifie : les chiffres de 2012/2013 indiquent, en 2de : 6/28 ; en 1ère : 17/31 ; T : 22/28. Nous n’avons pas de chiffres pour les jeunes filles.
Ce qui nous habite
Assurément nos élèves comme les autres restent blessés par le péché originel. Et si notre établissement est sans nul doute très préservé par rapport à d’autres, notre rôle consiste justement à continuer de préserver le plus grand nombre – spécialement les plus faibles et les plus fragiles – en maintenant une grande vigilance face au problème de contamination. Aussi nous n’hésiterons pas à nous montrer de plus en plus sévères si nous avons à traiter le cas d’élèves qui sont laissés trop libres de faire à peu près ce qu’ils veulent dans ce domaine et qui viendraient à se vanter de leurs exploits à l’école. Nous ne pouvons plus le permettre et c’est pourquoi nous n’attendrons plus la fin de l’année pour nous séparer d’élèves à qui nous ne faisons plus de bien et qui abîment leurs camarades.
Les derniers souverains pontifes n’ont eu de cesse de réveiller nos consciences face à la « banalisation du mal » et aux « structures du péché » promues par la « culture de mort ». Inconsciemment, nous en portons tous aujourd’hui la blessure. Et nous pleurons de rage de voir des élèves perdre la clarté de leur regard en quelques mois, parce que les parents n’ont pas su ou pas eu le courage de faire le nécessaire pour les protéger.
Que de fois avons-nous entendu, souvent de la bouche des parents : “Nous faisons confiance à notre enfant”, “il doit apprendre à utiliser ces nouveaux outils”, “vous voyez le mal partout”, etc. Et que de fois, avons-nous reçu un message d’excuse après enquête des parents : “C’est vous qui aviez raison !”. Hélas…
Le chanoine Denis nous confiait un jour en salle des professeurs : « Moi qui étais bachelier il y a dix ans seulement, j’ai souvent le sentiment étrange d’avoir vécu un autre lycée que celui de mes propres élèves, bien différent du leur et certainement plus proche du vôtre pourtant plus lointain. Mes lycéens me sont proches par leur âge et leur enthousiasme. Mais ils sont une génération blessée, blessée principalement par ces écrans que l’on met dans leurs mains ».
Chers parents, il ne s’agit pas ici d’être rigides mais lucides et réalistes. Force est de constater combien la capacité de raisonnement de nos élèves est mise à mal par l’immédiat du clic, d’une brève ou d’une info, leurs liens d’amitié dénaturés par les réseaux sociaux et leur âme blessée par une pornographie toujours plus accessible.
Nous vous invitons à réfléchir à cette situation nouvelle. M. Daniel Chapelier, directeur de Stanislas à Paris, écrivait aux parents avant Noël sur ce sujet : « Il n’est pas moderne que son enfant reçoive un Smartphone, un ordinateur portable, une tablette… Ce n’est pas moderne, c’est inconscient… Les parents de trente-cinq à quarante-cinq ans ne mesurent pas ce qui se passe dans le monde des enfants de six à douze ans aujourd’hui. C’est tellement loin de ce qu’ils ont connu… Nager contre la marée, souffler contre le vent, sont des devoirs quand, après avoir réfléchi en son âme et conscience, on pense que quelque chose est mauvais. »
Nous félicitons les parents prudents qui résistent aux courants dominants, car nous savons tous combien il est fatigant et même usant de résister, de dire “non”, encore. Ces mêmes enfants vous remercieront plus tard ; plus tard, nous aurons notre récompense.
Philippe Maxence, dans un éditorial récent de « l’Homme nouveau » écrit à propos d’internet : « Internet est un outil absolument fascinant, qui n’est pas le fruit du hasard, mais a vu le jour au terme de la mise en branle d’une philosophie qui, au fil des siècles, à travers une multitude d’aléas, a donné la priorité au « faire » sur la contemplation. Extraordinaire moyen de communication, Internet n’en reste pas moins le reflet actuel d’une des plus grandes tentations qui se présentent à l’intelligence et, de ce point de vue, sa nouveauté est absolument nulle. Déjà, dans la Grèce antique, Héraclite se montrait fasciné par le mouvement dans les choses au point de ne pas voir l’être même de celles-ci ».
Nous ne rejetons pas internet par principe ; nos lycéens y ont même accès à l’école, sous certaines modalités.
Mais nous devons faire grandir nos enfants et le faire dans un monde peu propice à la vie intérieure et à l’élévation de l’âme.
Bien sûr, chaque enfant est différent et nous sentons bien que certains sont plus attirés que d’autres par telle ou telle tentation, mais il nous faut adopter un cadre minimum qui favorise la vertu et les saines distractions, et en même temps limite le vice, l’abrutissement ou simplement la perte du temps.
C’est pourquoi nous vous conseillons instamment de réfléchir aux règles en vigueur chez vous et de ne pas hésiter à les remettre à plat.
Dans plusieurs familles par exemple, les téléphones portables des enfants – même des plus grands – restent dans l’entrée de la maison, dans une corbeille ou sur une étagère mais jamais dans les chambres. Cela évite aux enfants de prendre sur leur temps de sommeil pour envoyer leurs sms, mms ou regarder des films.
Dans ce domaine, comme dans beaucoup d’autres, le bon sens et les discussions dans les foyers permettent de trouver les réponses les plus adaptées aux défis que nous connaissons et qui se développent chaque année avec l’arrivée de nouveaux gadgets. La presse nous annonce la mise sur le marché de montres connectées à internet !
Si certains d’entre vous ne comprennent pas les raisons de toutes ces précautions, ou plus globalement “quelle mouche nous pique”, nous nous tenons à votre disposition pour en parler de visu avec vous.
Ajoutons une dernière raison qui nous pousse à adapter nos règles de vie dans l’établissement : les téléphones sont utilisés par certains élèves pour tricher pendant les devoirs, les fameux DST. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’ils sont interdits dans la plupart des lycées et collèges publics de France aujourd’hui.
Nos résolutions
De notre côté, et pour le bien commun de nos élèves comme celui de notre établissement, nous prenons donc les dispositions suivantes, qui entreront en vigueur le lundi 10 marsprochain:
1) les téléphones portables (connectés ou non) et tout objet connectable à internet (MP4, iTouch, iPod, iPad, …) sont désormais interdits dans notre établissement. C’est-à-dire qu’un élève ne doit pas en avoir avec lui ou sur lui, même invisible, quand il vient à l’école. Nous avons bien intégré qu’il ne pourra plus écouter sa « musique » préférée pendant les trajets si son baladeur est connectable sur internet.
2) Des tolérances pourront être accordées pour les téléphones, sur demande motivée et écrite des parents. Dans ce cas, le téléphone devra être marqué au nom de l’élève, déposé au secrétariat le matin et repris chaque soir.
3) Tout élève pris avec un téléphone portable (connecté ou non) ou un appareil connectable sans autorisation se le fera confisquer jusqu’à la fin de l’année scolaire. En cas de récidive, il sera exclu 8 jours de l’établissement.
4) Le téléphone est toléré chez les Terminales, et exceptionnellement pour cette année chez les 1ère filles (les plus grandes). Son usage est strictement interdit pendant la journée.
5) Tout élève qui serait pris en train de tricher avec un appareil sera exclu définitivement de l’établissement.
Prochainement, nous allons organiser une conférence pour les parents sur les dangers des réseaux sociaux. Cette conférence a déjà été donnée devant les classes du lycée et nous la renouvellerons chaque année.
Nous espérons, chers parents, que vous comprendrez l’intérêt de ces dispositions et vous assurons de notre vigilance renouvelée afin de permettre à tous nos élèves de pousser droit, sous le regard de Dieu, et d’être chacun une occasion d’élévation pour leur entourage. Plus que de « serrer les dents » ou de « serrer la vis », cette adaptation de notre règlement aux défis présents est une invitation pressante à nous « serrer les coudes » afin que chacun d’entre nous, à sa place de parents, de professeurs, d’éducateurs ou de prêtres agisse dans le même sens.
Plus que d’élever un rempart contre le mal, il s’agit de construire un pont pour le contourner… et de rapprocher nos enfants du Ciel !
Bonne et sainte quarantaine.
Très respectueusement
Michel Valadier
Nicole Durieux
Salvatore Niffoi
Marie-Hélène Tommy-Martin
Quelques conseils pratiques pour l’usage d’internet à la maison
Les autorités morales conscientes de leur devoir ont depuis longtemps mis en garde les parents en les suppliant d’être vigilants et prudents. Il s’agit d’adopter quelques mesures prudentielles simples ; elles sont connues, rappelons-les rapidement :
– si vous avez un ordinateur connecté à internet, il convient de le placer dans une zone de passage (entrée, pièce commune, etc.). La chambre des parents est souvent une fausse bonne idée, sauf si vous la fermez à clé.
– mettre un code d’accès sur votre ordinateur et le changer fréquemment. Les jeunes savent aujourd’hui « craquer » les mots de passe à l’aide de logiciels adaptés,et cela, sachez-le, n’arrive pas que chez les autres ! Par ailleurs, il nous semblebien entendu normal de donner le code aux plus grands de la famille. A partir de quel âge ? De notre côté, nous constatons un réel gain de maturité chez les jeunes entrant en Terminale.
– mettre un filtre efficace sur votre ordinateur. Nous recommandons celui développé par Optenet. Il peut être téléchargé facilement et ne coûte pas cher. Il est fourni gratuitement pour les clients de Bouygues et SFR.
– limiter le temps que nos enfants passent sur internet. Est-il normal qu’un élève de moins de 16 ans aille tous les jours consulter ses mails et/ou se connecter sur un réseau social ? Quelle perte de temps ! Optenet et les autres filtres existant sur votre ordinateur permettent de limiter les plages d’utilisation.
– si vous disposez d’une box ADSL et que vos enfants ont – malheureusement – un téléphone portable ou un iPad, iPod, iTouch, ou encore une tablette… alors ils ont eux aussi accès à internet ! Il est possible de bloquer cet accèsvia le wifià partir de la box,enlaprogrammantpour qu’elle n’accepte que les appareilsdésirés : activezle filtrage MAC et renseignezl’adresse MAC de chacun des appareils autorisés, ainsi seulsces équipements pourront se connecter. Vous pouvez égalementvérifierqui se connecte grâce à votre box et restreindre l’accès à internet à certaines heures.Votre fournisseurpeut vous conseiller.
– si dans votre foyer, il y a d’autres ordinateurs portables et tablettes, ils doivent tous avoir un mot de passe ET un filtre. Les pères de famille et vos grands garçons savent bien pourquoi ! C’est une excellente façon d’activer un ange gardien de plus et de se protéger contre notre propre faiblesse ou notre malice.
Si vous apprenez ces dispositions en lisant ces lignes, nous vous invitons à vous intéresser à ces questions !Nous n’avons tout simplement pas le droit d’ignorer ces choses ;n’aurons-nouspas des comptesà rendresi, à cause de notre faiblesse, paresse ou inconscience, nous n’agissonset que nos enfants sont salis à cause de nous?
Un mot sur la radio et la télévision. Ils en deviendraient presque sympathiques… Mais là encore, interrogeons-nous : est-il normal qu’un élève de 14 ans puisse écouter seul la radio dans sa chambre ? Il semble bien que la réponse soit là encore : “non”. Vous ne connaissez pas Fun radio ou SkyRock ? Eux, si ! Proposez plutôt à votre cher adolescent d’écouter la radio avec vous dans le salon… Quant à la télévision, notons simplement qu’une étude récente de l’Education nationale rapporte que la télévision est pénalisante pour les collégiens. « Un élève moyen ‘accro’ plafonnerait à 8,5/20 » (le Figaro du 3 février 2014).
Dans le domaine des jeux vidéo, savez-vous qu’il y a une alternative à l’usage de l’ordinateur ? Ce sont les consoles familiales de salon, type Wii, qui ne nécessitent pas de connexion internet et sont très conviviales.